Franck Esposito, Titou Le Boss
Un drame personnel converti en ambition sportive
Franck Esposito nait le 13 avril 1971 à Salon-de-Provence dans le sud de la France d’une mère d’origine pied-noire espagnole et d’un père originaire du Sud de l’Italie. Il grandit à Six-Fours, grand village entre Bandol et Toulon où il pratique la Natation assez jeune. Franck fut touché par le décès de sa Mamie Rose en 1985, celle qui avait balisé son enfance et qui voulait que son petit Franck soit toujours le meilleur. Franck fit alors à ses parents cette promesse pour elle : « Un jour, j’irai aux Jeux Olympiques ! ». C’est tout d’abord à la télé qu’il suit les Jeux Olympiques de Seoul en 1988 entre deux entraînements au sein des Cachalots de Six-Fours. Son entraîneur d’alors, Jacky Pellerin, l’oriente vers la nage papillon alors que Franck nageait plus souvent le dos. Une fois sa technique de pap maîtrisée, il se présente aux Championnats de France à Narbonne en 1990 ou il décroche le bronze sur le 100m dos mais surtout devient champion de France du 200m Papillon, mettant un terme à la domination de Christophe Bordeau. Pris par cet élan, Franck Esposito alias « Titou », comme le surnomme affectueusement sa maman, veut désormais tenir une deuxième promesse : « Marquer la Natation Française de son empreinte ! »
Les débuts sur la scène internationale
Il sera sélectionné dès 1990 en Equipe de France et il participera à ces premiers Mondiaux à Perth en Australie en janvier 1991. Après avoir pulvérisé le record de France du 200m Papillon en demi finale, le voilà face à des Grands Noms de la Natation Mondiale tels que l’Américain Melvin Stewart, l’Allemand Michael Gross, champion olympique en titre ainsi que le Hongrois Tamas Darnyi, le spécialiste incontesté du 4 nages. C’est justement après ces trois « monstres » qu’il échoue au pied du podium, mais quelle belle performance pour sa première échéance internationale ! La même année, à la fin de l’été à Athènes, Franck devient champion d’Europe du 200m pap et peut désormais aborder l’année olympique 1992 avec la promesse faite à sa Mamie : il sera bien présent aux Jeux Olympiques de Barcelone !
Le tremplin des JO de Barcelone
Barcelone, juillet 1992 : Franck Esposito s’apprête à se lancer pour sa course du 200m Papillon en série. Mais avant cela, son coach Jacky Pellerin ne manqua pas de lui rappeler pour qui il va nager. Ce qui lui fournit un certain peps, étant donné qu’il finit avec le 3ème temps des séries. Franck décida de se faire plaisir en Finale, sachant bien que l’Américain Melvin Stewart était hors de portée. Après une formidable course, Franck accroche la médaille de bronze derrière Stewart et l’inattendu Néo-Zélandais Danyon Loader. Pour ses premiers JO, la médaille est un sacré exploit et de là-haut, Mamie Rose peut-être désormais très fière de son petit Franck !
Barcelone marque la fin d’une histoire, celle de Franck Esposito avec son coach de ses débuts, Jacky Pellerin. Leurs chemins se séparent. Jacky part vers Canet en Roussillon et Franck vers Antibes où il rejoint son nouvel entraîneur Michel Guizien qui lui apporte beaucoup plus de rigueur. Franck en demande justement, mais il faudra un peu de temps pour que le travail porte ses fruits. Lors de l’Euro 1993 à Sheffield, Franck voit sur sa route un nouvel adversaire, le Russe Denis Pankratov qui lui chipe son titre européen sur le 200m papillon. « Espo » se contente de la seconde place en plus de sa 5ème place sur le 100m pap mais voit cela comme un terrible revers qui lui fera beaucoup de mal. Il mettra du temps à se relever, en bassin de 50m du moins, car la fin d’année 1993 est marquée par la toute nouvelle compétition proposée par la FINA : Les Championnats du Monde en Petit Bassin ! Franck Esposito y dépose d’entrée sa marque en décrochant le premier titre mondial en petit bassin de sa spécialité, le 200m Papillon devant les Allemands Christian Keller et Chris-Carol Bremer.
Une traversée du désert
Une parenthèse bien sympathique avant une traversée du désert où Franck stagnera au niveau de ses performances. En effet, dès les Mondiaux 1994 à Rome, Franck est abonné aux 6ème places, sur les 100 et 200m papillon ainsi que sur le relais 4x100m 4 nages. L’année suivante à l’Euro de Vienne, il manque de se qualifier pour la finale du 200m pap et ne fait que 5ème sur le 100m pap. Après le gros échec Autrichien, Franck entreprend un gros travail sur lui-même afin de retrouver un mental de vainqueur et d’aborder les JO d’Atlanta qui se profilent au bon moment ! Arrivé à Atlanta, en juillet 1996, Franck Esposito parvient à redresser la barre, mais manque de presque rien la 3ème marche du podium obtenu par l’Australien Scott Goodman, avec en 2ème position l’Américain Tom Malchow et en 1ère position l’intouchable Russe Pankratov. Pourtant Franck voit d’un bon oeil sa participation à ces olympiades. Il avoue vivre son rêve en faisant partie des meilleurs mondiaux de sa spécialité.
Des changements payants
Un changement dans la vie de Franck Esposito va être le détonateur pour la suite de sa carrière. La naissance de son fils Louka lui redonne l’enthousiasme qui lui fit surement défaut ces dernières années. 1997 est l’année de l’Euro à Séville en Espagne. Son coach Michel Guizien a nettement intensifié son travail de préparation et ça finit enfin par payer : 6 ans après son premier titre européen, Espo retrouve sa couronne en devançant l’Ukrainien Denys Sylantyev et le Britanique Stephen Parry. Il s’empare également du bronze sur le 100m pap remporté par le Suédois Lars Frölander. Franck accompagne une belle moisson de médailles pour l’équipe de France avec notamment Julien Sicot, Roxanna Maracineanu et Xavier Marchand et en gardera un très bon souvenir.
A un cheveu du Graal !
1998 rime avec Mondial pour bon nombre d’entre nous ! (images des bleus en Coupe du Monde). Heu non, là je veux parler des Championnats du Monde de Perth ! Ne vous trompez pas de registre ! Et là Franck Esposito explose en établissant la meilleure performance de ces championnats sur le 200m pap lors des demies-finales. Et en finale il domine sur toute la course jusqu’au dernier moment où il se fait coiffer sur le fil par l’Ukrainien Sylantyev. Il ne sera pas le tout premier champion du monde Français de Natation comme l’est devenue sa compatriote Roxanna Maracineanu durant ces même mondiaux. Mais Espo prendra cela tout de même comme une grande victoire et la dédiera à « Monsieur Guizien », son très cher coach !
Des malchances à la chaîne
L’année suivante, il est sur le point d’annuler sa participation aux Championnats d’Europe d’Istanbul. Franck annonce à ses coéquipiers son forfait juste avant le départ. Il fait à ce moment-là face à des problèmes personnels. Mais change d’avis au dernier moment. Et il n’a pas à le regretter, vu que c’est un troisième titre européen qu’il décroche en Turquie avec en plus une honorable 4ème place sur le 100m pap. Ce qui présage de belles promesses pour les JO de Sydney qui approchent. Il s’y prépare grandement quitte à snober l’Euro d’Helsinki en mai 2000. Mais manque de bol, Franck contracte un virus lors du stage de préparation en altitude à Font Romeu qui lui fait perdre 4 kilos et ainsi tout espoir de médaille olympique. En finale du 200m Pap il échoue à la 8ème et dernière place. Espo plonge à ce moment-là dans un profond désarroi, le décourageant dans un premier temps à reprendre l’entraînement, puis le poussant à tout plaquer, de délaisser le 200m papillon pour le 100m. Mais il reviendra finalement sur sa décision.
Franck Esposito se reprend sérieusement en main, toujours au sein de son club d’Antibes avec qui il participe à la finale des interclubs et où il reprend le record du monde du 200m pap en petit bassin en 1’51″58, huit ans après l’avoir abandonné.
Une suite de carrière tonitruante
Aux Mondiaux 2001 à Fukuoka au Japon, Franck n’est pas loin de réussir un gros coup. Il n’arrive que 4ème d’une finale qui voit le jeune Américain Michael Phelps étrenner ses premiers titres internationaux dont celui-ci sur le 200m Papillon. Francky revient du Japon avec tout de même un nouveau record d’Europe en poche et il ne va pas s’arrêter là puisque l’année suivante il conquiert un 4ème titre européen de sa distance fétiche, le 200m pap devant son rival Sylantyev. Ainsi qu’une première médaille internationale en relais avec l’argent sur le 4x 100m 4 nages en compagnie de Pierre Roger, Hugues Dudoscq et un autre Antibois, Romain Barnier. L’année encore d’après, en 2003, c’est à nouveau le titre européen en petit bassin cette fois-ci à plus de 2 secondes de son poursuivant, le Britannique Stephen Parry. Mais sur le plan mondial, c’est moins la fiesta. Notre « Titou » National ne fait que 7ème du 100m pap aux Mondiaux de Barcelone en 2003 et pour ses ultimes Olympiades à Athènes, il ne passe même pas les demies-finales du 200m pap. Sa dernière compétition internationale salutaire digne de ce nom sera l’Euro 2004 à Madrid où il sera médaillé d’argent non pas sur le 200m mais sur le 100m pap. Franck acquiert avec Simon Dufour, Hugues Duboscq et Julien Sicot l’argent avec le relais du 4x100m 4 nages ! Son départ à la retraite sera marqué par une dernière apparition aux Championnats de France à Nancy en 2005 où une partie du public sera en maillot blanc pour lui rendre hommage. Il fit un chrono qualificatif pour les Mondiaux de Montreal, mais Franck sentit que s’en était bel et bien fini pour lui. Du moins dans le bassin …
Embarras du choix niveau reconversion
Hé oui, du moins dans le bassin, car Francky enchaîna dans la foulée au bord du bassin pour occuper dès septembre 2005 le poste de manager général du Cercle des Nageurs d’Antibes. Mis à part quelques parenthèses en tant que consultant pour RMC ou Canal+, il entrainera quelques grands noms tels que Coralie Balmy ou encore Fantine Lesaffre.
Avec 32 titres de champion de France, 4 titres européens, 2 records d’Europe et 4 records du monde au 200m papillon, Franck Esposito n’a peut-être pas le plus grand palmarès de la Natation Française, mais il a su la marquer par son empreinte, comme il l’avait promis, par sa longévité surtout, mais aussi par son charisme et sa présence. Parce que Franck Esposito n’est pas qu’un nageur, c’est un Boss, c’est LE Boss que chacun de nous aimerait avoir comme entraîneur !